N'est pas mort ce qui à jamais dort ...

Experience de Milgram

31 Janvier 2012 , Rédigé par Kthullu Publié dans #Experience de psychologie inquiétantes

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   En 1961, Stanley Milgram, psychologue à l'université de Yale, se pose une question: la seule force de l'obéissance peut-elle pousser un peuple à en éliminer un autre? Si les soldats américains avaient reçu les memes ordres que les nazis, l'holocauste se serait-il produit aux Etats unis? Pour éprouver son hypothèse, Milgram va se lancer dans une série d'experiences ou les cobayes vont se retrouver confrontés à un choix cruel: le sujet A pose des questions au sujet B. Si le sujet B se trompe, le sujet A lui envoie des décharges electriques de plus en plus fortes. Le sujet A croit que le but de l'experience est de tester l'impact du stress sur la mémorisation. Il croit aussi que le sujet B est un volontaire, tout comme lui. Mais en réalité, il est le seul cobaye. Et l'objet du test, c'est sa soumission aux ordres de l'experimentateur, qui l'encourage à electrocuter son camarade. Dans une telle situation, quel pourcentage de gens irait jusqu'à mettre en danger la vie du sujet B? Les résultats que Milgram dévoila continuent à sidérer 40 ans plus tard...

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L'expérience de Milgram est une expérience de psychologie réalisée entre 1960 et 1963 par le psychologue américain Stanley Milgram. Cette expérience cherchait à évaluer le degré d'obéissanced'un individu devant une autorité qu'il juge légitime et à analyser le processus de soumission à l'autorité, notamment quand elle induit des actions qui posent des problèmes de conscience au sujet.

Les résultats ont suscité beaucoup de commentaires dans l’opinion publique, mais la méthode utilisée a fait naître critiques et controverses chez les psychologues et les philosophes des sciences.

 

L'objectif réel de l'expérience est de mesurer le niveau d'obéissance à un ordre même contraire à la morale de celui qui l'exécute. Des sujets acceptent de participer, sous l'autorité d'une personne supposée compétente, à une expérience d'apprentissage où il leur sera demandé d'appliquer des traitements cruels (décharges électriques) à des tiers sans autre raison que de « vérifier les capacités d'apprentissage ».

L'université Yale à New Haven faisait paraître des annonces dans un journal local pour recruter les sujets d'une expérience sur l'apprentissage. La participation devait durer une heure et était rémunérée 4 dollars américains, plus 0,5 $ pour les frais de déplacement, ce qui représentait à l'époque une bonne affaire, le revenu hebdomadaire moyen en 1960 étant de 25 $1. L'expérience était présentée comme l'étude scientifique de l'efficacité de la punition, ici par des décharges électriques, sur la mémorisation.

La majorité des variantes de l'expérience a eu lieu dans les locaux de l'université Yale. Les participants étaient des hommes de 20 à 50 ans de tous milieux et de différents niveaux d'éducation. Les variantes impliquent le plus souvent trois personnages :

  • l’élève (learner), qui devra s'efforcer de mémoriser des listes de mots et recevra une décharge électrique, de plus en plus forte, en cas d'erreur ;
  • l'enseignant (teacher), qui dicte les mots à l'élève et vérifie les réponses. En cas d'erreur, il enverra une décharge électrique destinée à faire souffrir l'élève ;
  • l’expérimentateur (experimenter), représentant officiel de l'autorité, vêtu de la blouse grise du technicien, de maintien ferme et sûr de lui

L'expérimentateur et l'élève sont en réalité des comédiens et les chocs électriques sont fictifs.

Dans le cadre de l'expérience simulée (apprentissage par la punition), élève et enseignant sont tous deux désignés comme « sujets » (subject). Dans le cadre de l'expérience réelle (niveau d'obéissance, soumission à l'autorité), seul l'enseignant sera désigné comme sujet.

Au début de l'expérience simulée, le futur enseignant est présenté à l'expérimentateur et au futur élève. Il lui décrit les conditions de l'expérience, il est informé qu'après tirage au sort il sera l'élève ou l'enseignant, puis il est soumis à un léger choc électrique (réel celui-là) de 45 volts pour lui montrer un échantillon de ce qu'il va infliger à son élève et pour renforcer sa confiance sur la véracité de l'expérience. Une fois qu'il a accepté le protocole, un tirage au sort truqué est effectué, qui le désigne systématiquement comme enseignant.

L'élève est ensuite placé dans une pièce distincte, séparée par une fine cloison, et attaché sur une chaise électrique. Le sujet cherche à lui faire mémoriser des listes de mots et l'interroge sur celles-ci. Il est installé devant un pupitre où une rangée de manettes est censée envoyer des décharges électriques à l'apprenant. En cas d'erreur, le sujet enclenche une nouvelle manette et croit qu'ainsi l'apprenant reçoit un choc électrique de puissance croissante (15 volts supplémentaires à chaque décharge). Le sujet est prié d'annoncer la tension correspondante avant de l'appliquer.

Les réactions aux chocs sont simulées par l'apprenant. Sa souffrance apparente évolue au cours de la séance : à partir de 75 V il gémit, à 120 V il se plaint à l'expérimentateur qu'il souffre, à 135 V il hurle, à 150 V il supplie d'être libéré, à270 V il lance un cri violent, à 300 V il annonce qu'il ne répondra plus. Lorsque l'apprenant ne répond plus, l'expérimentateur indique qu'une absence de réponse est considérée comme une erreur. Au stade de 150 volts, la majorité des sujets manifestent des doutes et interrogent l'expérimentateur qui est à leur côté. Celui-ci est chargé de les rassurer en leur affirmant qu'ils ne seront pas tenus pour responsables des conséquences. Si un sujet hésite, l'expérimentateur lui demande d'agir. Si un sujet exprime le désir d'arrêter l'expérience, l'expérimentateur lui adresse, dans l'ordre, ces réponses

  1. « Veuillez continuer s'il vous plaît. »
  2. « L'expérience exige que vous continuiez. »
  3. « Il est absolument indispensable que vous continuiez. »
  4. « Vous n'avez pas le choix, vous devez continuer. »

Si le sujet souhaite toujours s'arrêter après ces quatre interventions, l'expérience est interrompue. Sinon, elle prend fin quand le sujet a administré trois décharges maximales (450 volts) à l'aide des manettes intitulées "Danger de Mort" situées après celles faisant mention de Attention, choc dangereux. "


À l'issue de chaque expérience, un questionnaire et un entretien avec le sujet permettaient de recueillir ses sentiments et d'écouter les explications qu'il donnait de son comportement. Cet entretien visait aussi à le réconforter en lui affirmant qu'aucune décharge électrique n'avait été appliquée, en le réconciliant avec l'apprenant et en lui disant que son comportement n'avait rien de sadique et était tout à fait normal

Un an après l'expérience, il recevait un nouveau questionnaire sur son impression au sujet de l'expérience, ainsi qu'un compte rendu détaillé des résultats de cette expérience

Lors des premières expériences menées par Stanley Milgram, 62,5 % (25 sur 40) des sujets menèrent l'expérience à terme en infligeant à trois reprises les électrochocs de 450 volts. Tous les participants acceptèrent le principe annoncé et, éventuellement après encouragement, atteignirent les 135 volts. La moyenne des chocs maximaux (niveaux auxquels s'arrêtèrent les sujets) fut de 360 volts. Toutefois, chaque participant s'était à un moment ou à un autre interrompu pour questionner le professeur. Beaucoup présentaient des signes patents de nervosité extrême et de réticence lors des derniers stades (protestations verbales, rires nerveux, etc.).

Milgram a qualifié à l'époque ces résultats « d’inattendus et inquiétants ». Des enquêtes préalables menées auprès de 39 médecins-psychiatres avaient établi une prévision d'un taux de sujets envoyant 450 volts de l'ordre de 1 pour 1000 avec une tendance maximale avoisinant les 150 volts 

Mais qu'advient-il lorsque l'ordre de poursuivre est communiqué non plus directement, mais à l'aide d'un interphone par exemple, ou lorsque l'expérience doit se dérouler en l'absence momentanée de l'expérimentateur ? Il apparaît que dans de telles conditions, le pourcentage de sujets «obéissants» tombe à un peu plus de 20 %. Il semble donc que les conditions de soumission se modifient, dès le moment où le libre arbitre de l'individu a la possibilité de se manifester.

Qu'en est-il alors des personnes appelées à fonctionner dans des institutions régies par des règles strictes, et soumises au pouvoir quasi absolu d'une minorité «d'experts»? Des chercheurs (Hoffling et al., 1966) tentèrent de l'observer auprès des infirmières, responsables chacune d'un des 22 services rattachés à deux hôpitaux, l'un public et l'autre privé. Les résultats de cette expérience montrent un pourcentage réellement impressionnant de soumission docile à un supérieur hiérarchique (ici, c'était un médecin, En savoir plus sur cette expérience?).

Milgram a montré, lui aussi, que lorsqu'un sujet sait qu'il n'a qu'un rôle d'intermédiaire et qu'il ne peut donc être directement tenu pour responsable de l'acte posé, le taux de docilité monte à 90 %.

Alors, que conclure ? Doit-on désespérer devant de telles constatations, en se disant que la soumission à l'autorité est bel et bien inscrite dans la nature humaine ? Assurément non. Des recherches ultérieures ont montré que lorsque les sujets étaient en présence d'autres individus refusant d'obéir, ils refusaient à leur tour de le faire, dans une proportion de 90 %.

Il semble donc que l'espoir repose et continue de reposer sur la présence d'individus ou de groupes œuvrant sans arrêt à dénoncer les abus et l'injustice, afin de servir de contrepoids aux tendances à l'apathie et à la soumission, qui caractérisent la majorité.

Les expériences ayant eu lieu avant 1968, à une époque à laquelle il était donc donné à l'autorité un poids qui ne lui fut plus autant reconnu par la suite, il était ensuite espéré que, de ce fait, une amélioration du pourcentage de résistants aux pressions. Comme ils ont vu, il n'en fut rien. Le pourcentage d'environ 10% de réfractaires aux pressions, le même qui fut constaté aux lavages de cerveau pendant la guerre de Corée, resta sensiblement le même.

 

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